Très actuel, c’est un sujet qui a parfaitement été traité par la dessinatrice Emma dans sa BD « Fallait demander » !

« Fallait demander », c’est un mot qu’on peut entendre souvent dans un couple.

La femme, et encore plus la jeune maman en congé maternité, qui ne travaille plus, devient très souvent gestionnaire du foyer malgré elle…

Se retrouver gestionnaire de la maison malgré soi

Jeune maman, je ne peux que malheureusement confirmer les changements qui peuvent s’opérer au sein du couple et de la nouvelle famille à l’arrivée d’un enfant.

Si les choses étaient plus ou moins équilibrées côté tâches ménagères avant l’arrivée de notre fils, le fait que je sois en congé maternité a bouleversé cet équilibre. Sans compter le fait qu’il fallait se remettre de l’accouchement, gérer les bouleversements hormonaux etc…

Souvent, cette charge nouvelle est liée au fait que le papa reprenne vite le travail après la naissance d’un enfant. Un congé paternité plus long permettrait vraiment de réduire ces inégalités. Cependant, avec un papa travaillant à la maison et ayant eu une activité réduite aux deux premiers mois de notre fils, je dois dire que ces inégalités se sont malgré tout bien creusées…

A notre époque, les hommes sont bien plus investis dans le foyer que ne le sont nos propres pères, cependant, je pense que des images et fonctionnements restent encore bien ancrés dans les mentalités sur la gestion du foyer et des enfants par les mamans.

De mon côté, je me suis retrouvée malgré moi à gérer quasiment toutes les tâches ménagères (pas toutes, n’exagérons pas, mais la très grande majorité), car si je ne le faisais pas, rien ne se faisait… Le sol était sale, j’attendais parfois une journée, et voyant que mon conjoint ne faisait rien, je me retrouvais à le faire, tout en m’occupant de mon bébé (le porte-bébé m’a été très précieux). De même pour les repas… Je ne voulais pas au début « demander de l’aide », car j’estimais que ce n’était pas de l’aide, mais juste une répartition normale des tâches dans une maison où l’on vit ensemble. Cependant, si je ne demandais pas, rien ne se passait… J’ai donc commencé à tout faire sans rien dire, repas, ménage, jusqu’au moment où je me suis épuisée et énervée… Après un « craquage », pendant deux jours, il reprenait des choses en main, puis rebelote, il fallait à nouveau gérer tout seule jusqu’à la nouvelle dispute. Heureusement, ma maman est venue une semaine chez nous pour m’aider avec la gestion des tâches ménagères pour que je n’ai à m’occuper que de mon fils pendant quelques jours. Je pense que j’ai clairement ma responsabilité, car, avec la fatigue, la communication est devenue moins claire, et j’attendais beaucoup sans demander les choses. J’essaie aujourd’hui de parler davantage, mais ce n’est pas toujours facile car on tombe vite dans le reproche, ce qui n’est ni très efficace ni constructif pour notre couple.

Souvent, les jeunes papas de notre époque cherchent à bien faire et sont de bonne volonté, mais ont besoin qu’on leur rappelle de faire les choses, qu’ils soient en quelque sorte assistés dans ces tâches… On se retrouve donc à déléguer des missions malgré nous, et cette gestion des tâches ménagères et des repas représente en tant que tel du temps.

Mansplaining a fait un très bon podcast sur le sujet : Charge mentale : hommes assistés, femmes lessivées à retrouver ICI J’invite tous les hommes et toutes les femmes aussi à l’écouter. J’ai envoyé le lien à mon chéri, mais je pense qu’il n’a pas dû l’écouter… 😉

S’occuper de bébé jour et nuit

Or, si l’on est en congé maternité, c’est pour s’occuper de son bébé, de jour, comme de nuit, l’éveiller, l’occuper. Les premiers mois de bébé, _et les suivants d’ailleurs_ , sont très intenses et les temps de repos sont rares, hormis les siestes.

L’allaitement augmente la fatigue, et limite le relais entre parents notamment la nuit. Ici, le tire-lait est intéressant pour se reposer un peu sur le papa, mais il faut attendre que la lactation soit bien en place, et que le bébé prenne bien le biberon. De notre côté, l’acceptation du biberon a été tardive… ce qui fait que j’ai été seule (et que je le suis encore d’ailleurs) dans la gestion des nuits. Par ailleurs, le papa a un sommeil bien lourd et ne se réveille pas (ou pas souvent) quand notre fils s’agite.

Outre la gestion du quotidien de bébé, il y a bien entendu les « à côté » : rechercher un mode de garde pour la reprise du travail, suivre les rendez-vous médicaux de bébé, sa santé, gérer le planning des bains, la garde-robe de bébé (et on change très vite de taille la première année), donner tous les repas, préparer ensuite les petits pots, trouver les jouets et livres adaptés à son âge, etc.

C’est vraiment énorme à gérer au quotidien. Et on n’a plus de temps pour soi lorsque le conjoint ne prend pas un peu le relais. J’ai de la chance que le papa soit là à la maison et prenne un peu Hugo par moment pour me laisser le temps de me doucher etc, mais malgré tout, le gros repose sur moi, et je n’arrive pas encore à reprendre réellement du temps pour moi, ainsi que pour notre couple.

J’ai aussi l’impression qu’il a fallu, dans les premiers temps, impulser les moments entre bébé et son papa. Je pense que cela n’a pas simple non plus pour mon amoureux car j’avais du mal aussi parfois à lâcher prise et à laisser notre fils. Depuis les premiers sourires de notre fils, j’ai l’impression que c’est plus simple pour lui, qu’il s’investit plus volontiers car il voit aussi en retour le bonheur que son fils a quand il le retrouve.

Et la reprise du travail…

Je reprends de mon côté la semaine prochaine après un congé parental de deux mois. Normalement, j’aurais dû reprendre mi-mars, soit aux deux mois et demi de mon bébé… Je n’aurais clairement pas pu ! Entre la récupération physique, la volonté de poursuivre l’allaitement, les nuits écourtées assumées toute seule, cela aurait été très compliqué à gérer !

Il y aurait à faire dans ce domaine aussi. En France, les mamans au foyer ne sont pas valorisées dans leurs missions, ce qui est assez injuste, le congé maternité est très court et ne laisse pas le temps de revenir en forme au travail… C’est vraiment dommage, car il s’agit d’une réelle méconnaissance de ce que c’est que de prendre soin et d’élever un bébé. J’espère qu’on prendra vite exemple sur nos voisins scandinaves. Un an de congé parental pour s’occuper à plein temps de son enfant (sachant que trouver une place en crèche reste très compliqué dans de nombreuses villes), et à se répartir entre les deux parents, pour que chacun puisse tisser des liens forts avec son enfant, et pour que les mamans ne soient pas pénalisées professionnellement par la maternité.

De mon côté, je vais donc reprendre aux cinq mois de mon fils, ce qui reste tôt malgré tout. C’est normalement le papa qui devait garder notre fils pour un mois comme nous n’avons pas trouvé de solution de garde en fin de saison. Mais comme du travail s’annonce pour le papa ce mois-ci aussi, et que je dois reprendre en télétravail vu le contexte sanitaire, on va essayer de travailler à deux tout en s’occupant d’Hugo. On prévoit aussi de passer une semaine chez mes parents si le déconfinement le permet pour que ma maman s’occupe d’Hugo en journée si cela est trop chargé pour nous.

La reprise va être particulière car je verrai peu mes collègues, mais cela permettra une reprise en douceur, et une séparation progressive avec mon fils, chose que j’appréhendais énormément. J’ai hâte de me bloquer aussi des plages horaires juste pour mon travail, qui me plaît énormément, et de couper un peu du quotidien ménager de la maison. Cela va aussi rééquilibrer un peu les choses à la maison. Normalement, en septembre, je serai de retour au bureau, ce qui va finalement me permettre de retrouver un peu de temps pour moi. Mais j’ai peur de cette séparation avec mon fils, peur de rater des moments importants, peur de ne pas réussir à passer autant de temps avec lui que je le souhaiterais, peur qu’il m’en veuille un jour. J’appréhende tellement de ne pas réussir à concilier ma vie de maman avec ma vie professionnelle, d’assurer la bonne tenue de la maison (qui j’espère sera mieux répartie), et ma vie de femme et d’amoureuse aussi que j’ai clairement mise de côté. J’ai d’ailleurs décidé de reprendre à 80% pour profiter autant que possible de mon fils, et réussir à trouver un équilibre entre ma vie professionnelle et personnelle.

Il y a encore à faire…

Je trouve qu’il y a désormais tellement d’injonctions qui pèsent sur les femmes : faire carrière, être une maman parfaite, présente, avoir une maison digne d’un magazine de déco, faire des bons petits plats bio, rester féminine et prendre soin de son couple. Bref, sans aide, cela semble mission impossible.

Pour les hommes, les attentes sont quand même bien moindres encore de nos jours… Même si les temps changent et que les hommes sont bien plus investis que les précédentes générations, il y a encore du travail en la matière ! Et cela commence bien sûr par l’allongement du congé paternité qui serait essentiel pour les hommes, les femmes et les enfants.

J’espère que la génération d’Hugo sera celle où l’égalité entre les hommes et les femmes sera réelle et bien établie : avec l’égalité des salaires pour un même poste, la possibilité de progresser autant pour une femme qu’un homme, la valorisation des métiers d’éducation des enfants et des parents restant au foyer pour les élever, la répartition égale des tâches du quotidien dans le couple, et bien sûr des congés parentaux dignes de ce nom ! Je ferai mon maximum pour qu’il soit sensibilisé à ces enjeux essentiels d’égalité.